April Anne Viczko

April Anne Viczko

Protégée, 2006

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April Anne Viczko est conceptrice de décors, de costumes, d’éclairage et de projections, basée à Calgary. Elle a créé un livre animé pour Bitter Medicine de Clem Martini. Elle a aussi conçu les costumes pour trois productions au festival annuel playRites de l’Alberta Theatre Projects – Drama: Pilot Episode, Thinking of Yu et Ash Rizin. Plus récemment, elle a travaillé avec Vertigo Theatre, Citadel Theatre, The Belfry et Kill Your Television. Elle a été mise en nomination pour un prix Dora pour la conception des costumes pour Last Days of Judas Iscariot, pièce produite par Birdland Theatre et qui a reçu des critiques élogieuses.

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Dany Lyne

Dany Lyne

Lauréate, 2006

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2006 Lauréate

Selon les propres termes du jury, en choisissant Dany Lyne à titre de lauréate pour le Prix Elinore et Lou Siminovitch de théâtre 2006, « les membres du jury ont été particulièrement impressionnés par l’évolution de son oeuvre. Tout en respectant les métaphores des mots et de la musique, les travaux de Mme Lyne suivent la logique narrative de la pièce. Sachant répondre aux exigences imposées par le domaine de l’opéra, elle est aussi capable d’appliquer sa vision créatrice à des productions jouées dans des théâtres de toutes tailles. Chaque projet est pour elle une sorte de laboratoire, où elle collabore avec ses collègues artistes, tout en explorant et en mettant en application sa propre vision. Déterminée à exploiter à fond son potentiel de créativité, Mme Lyne est une artiste qui impose sa marque de façon unique et créative dans le théâtre canadien et au-delà.»

Mme Lyne a participé à 72 productions au Canada, aux états-Unis et en Europe, de nouvelles pièces à des opéras, de petits théâtres indépendants à de grandes scènes internationales. Ses oeuvres ont été vues au Stratford Festival of Canada, à la Compagnie d’opéra canadienne, au Théâtre français de Toronto, à la Necessary Angel Theatre Company, au théâtre Soulpepper, au Centre national des Arts, aux théâtres Tarragon et Elgin, au Tapestry New Opera Works, au Pacific Opera, à l’Opéra de Cincinnati, au Central City Opera de Denver, au Nationale Reisopera des Pays-Bas, à l’Opera North, en Angleterre et au De Vlaamse Opera, en Belgique, entre autres.

Discours d’acceptation

Merci infiniment aux fondateurs du Prix Siminovitch de théâtre. Merci à vous, Lou, ainsi qu’à votre regrettée épouse Elinor. Merci à Tony et Elisabeth Comper et à BMO pour cette magnifique soirée qui célèbre la scénographie canadienne. Et finalement, merci à vous Peter Hinton, pour avoir proposé ma candidature et pour votre collaboration remarquable et passionnée à nos projets.

Je voudrais également remercier ma famille d’élection : mes beaux-parents, Helga et Gerhard Rudolph, qui se sont infailliblement et passionnément intéressés à mon travail, ainsi que ma partenaire, Katja Rudolph, dont le soutien infatigable a contribué à me conduire jusqu’à ce podium. Elle n’a jamais mis en question les sacrifices que la pratique artistique exige et je suis inspirée par son propre cheminement artistique d’auteur. Le meilleur roman que j’ai lu cette année est d’elle – il est encore sous forme de manuscrit mais j’espère qu’il sera bientôt pris en charge par un agent ou un éditeur!

Le théâtre a sauvé ma vie… et il a aussi failli me tuer! Cette affirmation peut sembler mélodramatique et pourtant, elle est rigoureusement exacte.

Toute jeune, déjà, je voulais devenir une artiste. Ayant grandi dans une famille ravagée par la violence et les mauvais traitements, le mythe de l’artiste a été pour moi comme un phare. C’était une identité à laquelle je pouvais aspirer, la promesse d’une existence meilleure que les perspectives pitoyables que m’offrait mon entourage. J’allais jusqu’à me déguiser en artiste pour la fête d’Halloween – la caricature que je créais alors était un cliché, avec béret noir, bretelles, lunettes rondes et moustache grise comme mon cher Monsieur Bertillon, mon professeur d’art de quatrième année. Mais même à cet âge, je savais que l’artiste était une force puissante dans la société, un chercheur poétique et un agitateur politique. Je voyais l’artiste comme un créateur de beauté, quelqu’un qui met la beauté en question, un maître observateur et reporter, un iconoclaste engagé et un visionnaire. Pour une raison ou pour une autre, même étant jeune enfant, je savais que c’est l’artiste qui joue le rôle du conteur opiniâtre dans notre culture et notre société. C’est l’artiste qui reprend les histoires qui circulent ici et là – les histoires dominantes, les histoires perdues, les histoires de désolation et de désespoir, les histoires d’espoir et de rédemption – et qui les renouvelle en leur donnant une forme poétique et stylisée dans laquelle le public peut se voir comme dans un miroir. C’est l’artiste qui a pour seul but d’expérimenter, de révéler, de proposer, de s’engager, d’inspirer et de nous pousser à nous confronter avec nous-mêmes. C’est lui qui nous met au défi de faire face à notre propre humanité et à notre propre inhumanité et qui, de cette façon, contribue peut-être à une tentative commune de préparer un avenir paisible et spirituellement vivant pour nous tous. Pour moi qui suffoquais dans un silence familial de mort et dans une vision du monde à laquelle je ne trouvais aucun sens, cette autre vision d’une existence axée consciemment et délibérément sur la fonction de conteur d’histoires m’a permis de continuer à vivre. Elle m’a, je ne sais plus combien de fois, empêchée de me jeter dans le Saint-Laurent du haut du pont Jacques-Cartier. Aussi mélodramatique que cela puisse paraître.

Quand j’étais dans la vingtaine, une période qui fut pour moi tumultueuse, j’ai étudié les beaux-arts au Ontario College of Art and Design. C’est là que j’ai rencontré Paul Baker, qui donnait un cours d’introduction au théâtre. Je suis instantanément tombée amoureuse du théâtre. Je suis aussi tombée amoureuse de Paul, en tant que professeur! J’avais 26 ans et j’avais déjà travaillé dans les domaines de la décoration intérieure, des arts graphiques et de la conception typographique et j’essayais de devenir peintre. Manifestement, il m’a fallu pas mal de temps pour trouver mon médium!

Le théâtre avait été absent de mon enfance. C’est pourquoi, lorsque je l’ai découvert, j’ai été à la fois stupéfaite et fascinée. Le caractère véritablement multidimensionnel du théâtre m’impressionnait énormément : le théâtre est non seulement visuellement tridimensionnel, il se déroule dans un lieu particulier, en temps réel, il comporte des paroles dites ou chantées, il explore les vérités et mensonges de l’existence au moyen de la narration et il mobilise l’âme du musicien ainsi que la force expressive du corps humain. En outre, il tisse miraculeusement ensemble – et j’insiste ici sur le mot « miraculeusement » – la passion et la vision de nombreux collaborateurs : les idées psychologiques, spirituelles et politiques de l’auteur, la vision musicale du compositeur, la volonté d’interprétation de l’équipe créatrice – metteur en scène, chef d’orchestre, décorateurs, régisseur de plateau – la générosité des comédiens, chanteurs et musiciens ainsi que les compétences techniques et artistiques et le dévouement des équipes de production. Enfin, et tout aussi miraculeusement, il exige l’engagement et l’ouverture d’esprit d’un public. L’artiste en moi a vu dans le théâtre et dans l’opéra le médium le plus passionnant, le plus complexe et le plus ambitieux. J’ai succombé totalement au riche monde des mots, de la musique et des images et c’est ainsi que j’ai commencé à comprendre mon propre monde personnel et, enfin, à le voir réfléchi vers moi. La traduction des textes en images m’a donné le pouvoir de m’engager dans ma propre transformation.

La conception de décors et de costumes me permet de transformer un espace physique en un cadre psychologique et symbolique. En collaboration étroite avec le metteur en scène, j’essaie de créer visuellement l’arc poétique qui peut le mieux soutenir le déroulement du récit et représenter le paysage émotionnel des personnages. En me concentrant sur l’enchaînement des scènes et les métamorphoses des protagonistes, je cherche une métaphore visuelle centrale qui fait ressortir les thèmes sous-jacents et qui correspond au symbolisme de l’auteur. Que le texte traite de la politique de la guerre ou d’une question personnelle sans grande importance, une image saisissante peut, selon moi, incarner l’essence du drame. À l’intérieur de ce champ visuel poétique cohésif, mon but est de présenter l’histoire avec clarté, de manière à accentuer l’impact de chaque scène. Des décors et des costumes subtils et transformables peuvent exprimer les enjeux de l’histoire qui se déroule.

Le processus joue un rôle crucial dans la création de ce monde représenté. À plusieurs stades de la conception, j’invite les metteurs en scène à travailler avec moi dans mon atelier pendant des journées entières. Nous nous assoyons à mon bureau et nous étudions minutieusement le texte, ligne par ligne. Nous discutons de tout ce qu’il y a sous le soleil en rapport avec ce texte – nos opinions politiques, nos goûts esthétiques, nos propres biographies. Et nous commandons des tas de mets thaïlandais! Finalement, nous en arrivons à une compréhension commune de l’histoire et de sa pertinence mythique pour nous ainsi que pour l’époque et le lieu où nous vivons. L’électricité générée par un tel processus de création peut, si tout se passe bien, se maintenir jusqu’aux séances de travail avec les comédiens et jusqu’aux répétitions techniques. Les comédiens, les chanteurs et les concepteurs d’éclairages participent à ce processus créatif et leurs apports cumulés permettent de peaufiner notre univers dramatique.

Il est difficile d’expliquer l’euphorie que procure une soirée de première parfaite. Dans une carrière, on compte ces expériences sur les doigts de la main. Je me souviens d’une fois en particulier, c’était au Cincinnati Opera House, à l’occasion d’une production d’Elektra, de Strauss, dirigée par Nicolas Muni. À la fin, il y a eu plusieurs secondes de silence absolu, et puis soudain ce public conservateur du Midwest américain s’est levé en faisant un énorme bruit, applaudissant à tout rompre cette diatribe opératique à la fois débridée, atonale, déchaînée et exquise. Les applaudissements ont duré dix minutes. Pendant ce court laps de temps, tout ce que j’avais investi dans le processus de création m’a été rendu, et plus encore. Alors que je me sentais vidée – j’étais épuisée et faisais déjà le deuil d’un projet mené à terme – je me suis instantanément sentie comblée et j’ai su à ce moment-là que j’avais fait le plein de combustible créatif pour les deux ou trois prochaines années.

Mais comment le théâtre a-t-il failli me tuer? Comme je l’ai dit, je m’étais très tôt raccrochée aux arts comme à une bouée de sauvetage. Pour moi, les arts faisaient partie de la lutte désespérée que je menais quotidiennement pour une existence meilleure. Tout était investi dans le processus créatif et dans le trajet à parcourir pour placer quelque chose de substantiel, de beau et de poétique sur la scène. L’effort que cela exige est tout simplement indescriptible. Moi-même, je n’arrive jamais à comprendre pourquoi cet effort exige autant de temps et d’énergie. Je crains d’ailleurs qu’en raison de l’intensité que j’y mets – comme s’il s’agissait d’un combat à mort – ceux qui travaillent avec moi ne me trouvent guère reposante!

Mais au-delà des éléments liés à ma propre vie et à ma personnalité, il existe des obstacles très réels à la scénographie de grandes œuvres de théâtre et d’opéra au Canada. Le théâtre vous tue un petit peu chaque jour, tout en vous protégeant contre vous-même et en vous inspirant. Ce métier est tellement difficile à pratiquer! Premièrement, en Allemagne, un scénographe peut très bien gagner sa vie en travaillant à deux spectacles par année. Ici, deux spectacles par année ne suffisent pas. Pour vivre raisonnablement bien, un scénographe doit absolument travailler à de nombreuses productions qui se chevauchent, Ce rythme de travail est épuisant et intenable. Les minimums de la Professional Association of Canadian Theatres (PACT) établis avec l’Association des designers canadiens (ADC), qui sont les normes appliquées actuellement dans notre secteur d’activité, ne tiennent absolument pas compte des frais qu’il faut engager pour maintenir un atelier ni du fait que la scénographie est un travail qui exige énormément de temps. Si on divise leur revenu par le nombre d’heures travaillées, les scénographes sont probablement ceux qui ont le salaire horaire le plus bas dans le monde du théâtre au Canada. J’ai déjà calculé que j’avais réalisé une scénographie pour un salaire horaire de 6,35 $. Et il s’agissait d’une scénographie assez considérable, pour une compagnie importante. Alors que d’autres travailleurs du théâtre ont des contrats qui durent quelques semaines, les scénographes ont souvent des contrats portant sur plusieurs mois et s’étendant sur quelques années et les sommes forfaitaires qui leur sont versées n’en tiennent pas compte. Deuxièmement, les scénographes ne peuvent pas expérimenter, aller au bout de leur art et tester leurs matériaux si les théâtres ne soutiennent pas la recherche et le développement qui sont essentiels pour se perfectionner. Les théâtres hésitent souvent à payer pour ce risque et le scénographe doit alors se battre pour obtenir les ressources dont il a besoin. Par conséquent, le scénographe, contrairement à d’autres artistes de théâtre, se retrouve toujours, en définitive, inextricablement lié à l’argent et aux coûts imprévisibles que comporte la production de décors, d’accessoires et de costumes et il peut rarement être simplement un artiste qui cherche à se hisser à des niveaux artistiques plus élevés. Troisièmement, le fardeau financier de plus en plus lourd lié à l’administration des théâtres a pour effet de déplacer leur centre d’intérêt, de la scène vers les bureaux et vers les autres programmes que les théâtres offrent maintenant. La corporatisation du théâtre me préoccupe profondément. J’espère que nous n’irons pas trop loin dans cette voie qui conduit à gérer le théâtre comme une entreprise à valeur ajoutée. Les entreprises vendent des produits, mais le théâtre, lui, ne vend pas de produit : le théâtre participe à la vie des gens. Le théâtre est le cœur d’un peuple, un lieu où nous pouvons faire face à nous-mêmes, où nous pouvons raconter nos histoires, briser nos silences et sauver quelques vies, littéralement et spirituellement. C’est, en tout cas, ce qu’il devrait être. Les gouvernements doivent le reconnaître et les théâtres devront faire preuve d’inventivité pour équilibrer leurs comptes tout en se dotant d’administrations créatrices, favorables aux artistes et démocratiques. Nous devons nous souvenir que sans la scène, et sans les artistes qui l’habitent, les théâtres ne pourraient pas maintenir leurs autres programmes et leurs administrateurs y perdraient eux aussi.

Les combats que j’ai mentionnés ici poussent dangereusement les scénographes vers l’épuisement professionnel. L’épuisement professionnel, c’est la mort d’un artiste et, pour moi, cela signifie aussi, en quelque sorte, ma propre mort. Le combat pour porter ma vision sur scène m’a épuisée, ces derniers temps, malgré quelques exceptions notables. Les jeunes concepteurs ne restent pas assez longtemps dans le métier pour devenir les grands scénographes qu’ils pourraient être. Si l’artiste doit continuer d’être un phare pour les générations futures, si ces générations doivent continuer à aspirer à cette persona mythique, nous devons faire en sorte que les artistes n’abandonnent pas tous le domaine des arts pour aller travailler dans des banques. Nous avons besoin de gens qui travaillent dans des banques, mais en tant que société, nous avons aussi besoin d’artistes. Un prix comme celui qui m’est décerné ce soir constitue un énorme stimulant symbolique, ainsi que, pour quelques-uns d’entre nous, un formidable stimulant matériel au moment où cela compte le plus, c’est-à-dire en milieu de carrière, lorsque l’énergie faiblit, et tous les artistes présents ici ce soir en sont très reconnaissants. Il nous faudrait plus de prix comme celui-ci! Mais nous avons aussi besoin d’un changement systémique.

J’éprouve toujours un respect mêlé d’admiration pour l’aventure théâtrale. J’ai espoir que cette activité miraculeuse fondée sur la collaboration pourra elle-même constituer une sorte de métaphore exemplaire pour la vie à l’extérieur du théâtre. Quand je vois ce que des gens peuvent accomplir ensemble en partageant leur vision créatrice, cela me remplit d’espoir. Ce qu’il y a d’essentiel dans le théâtre, son pouvoir de transformer les choses, transportons-le dans le monde extérieur plutôt que de laisser les normes du monde extérieur régir nos théâtres. Nous devons décider d’être un peuple qui apprécie l’art qui enrichit la vie des gens, l’art qui peut même parfois sauver des vies, littéralement et spirituellement.

Et voici maintenant la partie vraiment agréable. C’est pour moi un immense plaisir de pouvoir honorer deux scénographes dont j’admire beaucoup le travail et l’engagement. April Anne Viczko, une artiste douée d’un grand discernement ainsi que d’un sens architectural et poétique. J’ai beaucoup travaillé avec April au cours des deux dernières années. Sa passion, son talent et son sens de l’humour inégalé peuvent contribuer considérablement à la réussite d’un projet. Et Camellia Koo, une méticuleuse interprète des œuvres sculpturales et symboliques. Son travail est caractérisé par la précision, la patience et une remarquable vision théâtrale. J’ai eu grand plaisir à travailler avec elle au cours des quatre dernières années.

Enfin, nous voulons également encourager une scénographe récemment diplômée, Jung-Hye Kim, dont le talent et la détermination à devenir scénographe sont remarquables. J’ai été vraiment impressionnée par son éthique de travail acharné et par son esprit d’initiative.

2006 Protégée

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Camellia Koo

Camellia Koo

Protégée, 2006

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Camellia Koo a travaillé avec le Festival Shaw à des décors et costumes pour Trifles, Topdog/Underdog et When the Rain Stops Falling et des décors pour Peace in Our Time: A Comedy, One Touch of Venus, et The Stepmother. Elle a également collaboré avec fu-GEN Asian Canadian Theatre Company, Fujiwara Dance Inventions et The Second City. Scénographe primée à plusieurs reprises, Camellia est diplômée de l’école de théâtre de Ryerson (production technique), elle détient un M.A. en scénographie du Central St. Martins College of Art & Design (Royaume Uni) et elle a été membre du Lincoln Centre Director’s Lab 2005. Camellia est ceinture bleue en Jiu Jitsu brésilien.

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Brigitte Haentjens

Brigitte Haentjens

Lauréate, 2007

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2007 Lauréate

Selon les propres termes du jury, en choisissant Brigitte Haentjens à titre de lauréate pour le Prix Elinore et Lou Siminovitch de théâtre 2007, le jury a souhaité rendre hommage à la prodigieuse virtuosité de son écriture scénique, ainsi qu’au caractère profondément humain de sa mission. « Dans le monde de Mme Haentjens, les idées saignent, les corps pensent et l’espace vibre. Son écriture dépasse toute classification; elle dépeint une tension à couper le souffle entre méticulosité et brutalité, et pousse les gens, même s’ils sont absorbés par le spectacle en lui-même, à se questionner sur les raisons profondes de leur existence, de leur identité, et ce, sans échappatoire possible. »

Mme Haentjens a étudié le théâtre à Paris avant de déménager en Ontario en 1977, où elle a assuré la direction artistique du Théâtre du Nouvel-Ontario durant huit ans. De 1991 à 1994, elle a été directrice artistique de la Nouvelle Compagnie Théâtrale, à Montréal, puis, de 1996 à 2006, elle a agi en tant que co-directrice artistique du Carrefour International de Théâtre de Québec. Mme Haentjens dirige également depuis 1977 sa propre compagnie théâtrale, Sibyllines, qu’elle a fondée pour y approfondir sa démarche artistique dans un contexte de plus grande liberté. Pour Sibyllines, elle travaille actuellement à une adaptation de la pièce Blasté (Blasted), de Sarah Kane, traduite par Jean-Marc Dalpé, mettant en vedette Paul Ahmarani, Céline Bonnier et Roy Dupuis, et qui doit prendre l’affiche au printemps 2008.

Discours d’acceptation

Tout d’abord, permettez-moi d’exprimer ma profonde gratitude envers les fondateurs du prix Siminovitch. Merci à vous, Lou, ainsi qu’à la regrettée Elinore Siminovitch. Votre travail a inspiré ce prix si unique, si généreux et si prestigieux.

Merci à BMO groupe financier, qui parraine ce prix, et à ses employés qui organisent cette soirée. Un merci tout spécial à Andrew Soren.

Toute ma gratitude va également aux membres du jury : Leonard McHardy, Geneviève Billette, Katrina Dunn, Valerie Moore et Carlo Guillermo Proto. Je tiens à remercier particulièrement Carlo Guillermo Proto et Geneviève Billette, qui ont travaillé très fort pour réaliser le document vidéo que vous venez de voir.

Je voudrais bien sûr remercier Paul Lefebvre, qui a présenté ma candidature et l’a fait de façon si éloquente et si généreuse.

Enfin, permettez-moi de remercier mon compagnon Stéphan, qui m’a si souvent manifesté amour, présence et soutien depuis plus de quinze ans. Sans son accompagnement, sa fierté vis-à-vis de mon travail et ses encouragements dans les moments les plus difficiles, je ne serais probablement pas ici ce soir.

Quand on m’a annoncé que j’étais la lauréate, j’en ai perdu le sommeil pendant toute une semaine ! Ce prix signifie en effet énormément pour moi.

Il m’honore et il honore toutes les communautés qui m’ont donné amour et soutien au cours de mes trente années de travail artistique : toute la communauté franco-ontarienne bien entendu, celle d’Ottawa, d’Hawkesbury, de Rockland, de Timmins, de Hearst et bien sûr celle de Sudbury, et plus particulièrement celle autour du théâtre du Nouvel-Ontario, mais aussi la communauté de Toronto où nous avons joué en anglais la pièce « Le Chien ». Je n’oublie pas la communauté franco-canadienne dans son ensemble, au sein de laquelle j’ai été si souvent active.

Enfin, je remercie la communauté de Montréal, de Québec et du Québec en général. Je leur dédie ce prix, ainsi qu’à tous ceux qui, comme vous ici ce soir, croient que l’art, s’il ne change pas le monde, du moins brise le silence assourdissant de la solitude.

D’aussi loin que je me souvienne, le théâtre a fait partie de ma vie.

Très jeune, j’ai eu à titre de spectatrice des chocs esthétiques puissants. Je me rappelle celui occasionné par le Marat-Sade que Peter Brook avait mis en scène en 1963; le spectacle, que je n’avais probablement pas compris, m’a tout de même percutée de plein fouet. Je me souviens aussi du 1789 d’Ariane Mnouchkine, qui m’a fait flotter sur un petit nuage brûlant durant des semaines.

Depuis, je ne compte plus les émotions fortes que j’ai vécues dans une salle de théâtre, ici ou ailleurs.

Le théâtre me fait l’effet d’une coupure, d’une brûlure, d’un coup de poing, d’un coup de fouet. Le théâtre me stimule, me bouscule et peut même m’enrager.

Le théâtre m’a toujours donné le goût de vivre, de créer, de me tenir debout et de me battre. Bref, le théâtre m’inspire tous les sentiments sauf celui du confort.

J’ai appartenu dès l’enfance à des troupes de théâtre amateurs, scolaires et communautaires. Et pourtant, je n’ai jamais imaginé faire de la mise en scène. En fait, j’ignorais quand j’étais jeune que la mise en scène puisse être un métier !

(Et aujourd’hui encore, je doute encore parfois que cela en soit un !)

Dans le milieu familial où j’ai grandi – mes parents n’avaient reçu qu’une éducation sommaire – il ne pouvait être question de vie artistique ou intellectuelle. De plus, j’appartiens à une des premières générations de femmes qui ont eu accès à une éducation supérieure.

De plus, j’appartiens à une des premières générations de femmes qui ont eu accès à une éducation supérieure.

Faire du théâtre pour gagner (plus ou moins bien) sa vie, se définir comme une artiste, m’apparaissait donc comme à la fois complètement mystérieux et totalement inaccessible.

En fait, probablement grâce à des enseignants formidables qui savaient partager leur passion des mots, je fus éveillée très tôt à la littérature et mon fantasme secret à l’adolescence fut peut-être d’espérer devenir une Simone de Beauvoir, pour ses livres, son intelligence et peut-être aussi pour ses ongles carmin, ses cigarettes et sa fréquentation de Jean Paul Sartre et de St-Germain-des-Prés !

Peut-être que, déjà, c’était la nécessité de dire qui m’animait. En tous cas les mots, les idées ont été le substrat de ma vie artistique.

Les mots des écrivains et des poètes, de William Faulkner à Antonin Artaud, de Flannery O’Connor à Krista Wolf, de Marcel Proust à Carson McCullers, de Sylvia Plath à Margaret Atwood, d’Ingeborg Bachmann à Michaël Ondatje, de Jean Marc Dalpé à Louise Dupré. Ces mots-là et ceux des écrivains de théâtre, bien sûr. Mais quand je fais du théâtre, je recherche avant tout la littérature et la poésie.

Je ne me souviens pas du tout comment je me suis retrouvée à l’Ecole de théâtre de Jacques Lecoq. J’avais déjà près de 25 ans et des études universitaires derrière moi…

Je ne sais pas ce que j’y cherchais. En tous cas certainement pas à faire une carrière dans le sens traditionnel du mot.

Je n’avais pas non plus imaginé mon avenir après l’école. Je ne savais ni à quelle porte frapper, ni comment me présenter (« Bonjour, je sors de l’école, puis-je faire la mise en scène de votre prochain spectacle à l’affiche ? »). Ni qu’il faudrait quitter mon pays d’origine pour que le théâtre puisse devenir toute ma vie.

Le choc qu’a représenté pour moi le premier contact avec la communauté artistique franco-ontarienne fut immense. À l’époque (en 1977) le théâtre était intimement lié à un projet global, sociétal. Il était lié à une prise de parole collective. Nous avions l’impression d’avoir le ciel ouvert devant nous, et comme l’écrit le poète Robert Dickson, hélas trop tôt disparu, notre paysage était celui de son poème :

Au nord de notre vie, Ici Où la distance use les cœurs pleins De la tendresse minerai De la terre de pierre De forêts et de froid

Nous Têtus, souterrains, solidaires Lâchons nos cris rauques et rocheux Aux quatre coins de l’avenir possible

Il s’agissait de dire, de donner la parole à ceux qui ne l’ont pas, de mettre en scène des personnages qui appartiennent à la race des oubliés. Il s’agissait de nommer le pays, les gens, de leur donner fierté et confiance.

Nous avons passé énormément de temps dans les communautés ouvrières d’Hawkesbury et de Sudbury, à rencontrer des travailleurs et des travailleuses du textile et de la mine, à écouter leurs histoires pour les écrire et les mettre en scène.

Je faisais la mise en scène des spectacles que nous écrivions, mais je la faisais un peu par défaut, comme si personne d’autre ne voulait le faire. Ce qui m’importait à l’époque, c’était, et c’est toujours, la simple nécessité de dire et d’exprimer un monde et de le partager avec quelqu’un, quelques-uns, un public, quoi.

Depuis, certes, nous ne sommes plus à l’époque où il semblait indispensable de se nommer et de se mettre en scène comme collectivité. Depuis, j’ai porté à la scène bien des textes d’origines très diverses, de Camus à Beckett, de Feydeau à Koltès. J’ai travaillé dans bien des théâtres, des petits et des grands. Depuis, j’ai quitté l’Ontario pour Montréal, le Théâtre du Nouvel-Ontario pour la NCT, puis les institutions pour la liberté.

J’ai fondé il y a dix ans la compagnie Sibyllines pour porter à la scène des textes contemporains de nature théâtrale ou littéraire, et faire entendre d’autre voix. Pour pouvoir le faire dans les meilleures conditions artistiques possibles. La qualité du processus de création m’apparaît aussi fondamentale que son résultat.

Au cours des années, et peut-être encore plus dans le contexte de liberté que me permet Sibyllines, la mise en scène est devenue ainsi pour moi une forme d’écriture. A travers les mots des autres ou à travers les silences qui me sont laissés.

Aujourd’hui, j’aime plus que tout faire entendre le silence. Le silence des écrivains et des écrivaines qui ont payé de leur vie leur combat avec les mots : Sylvia Plath, Ingeborg Bachmann, Virginia Woolf.

Le silence entre les mots, celui des corps. Le silence de l’impuissance, le silence de la violence.

Il me semble en effet que le théâtre est, de façon totalement paradoxale, autant le lieu du silence que celui de la parole. Un des seuls lieux où l’on peut encore penser en collectivité.

Après trente années de travail actif, la mise en scène me paraît toujours un énorme privilège. Privilège de faire circuler dans l’imaginaire collectif des mots et des signes qui ouvriront peut-être le cœur du public, et donneront peut-être matière à réfléchir sur le monde dans lequel nous vivons.

Privilège d’avoir avec le public une relation si fructueuse et si enrichissante.

Privilège de me retrouver dans une salle de répétitions en compagnie de livres, de textes, d’acteurs et de concepteurs, dans une atmosphère incroyablement intense de partage et de solidarité. D’avoir le plaisir de discuter, de fouiller des textes, de chercher la meilleure façon de les représenter sur scène. De chercher avec les interprètes pendant des heures le meilleur geste, le meilleur mouvement.

Permettez-moi de saluer ici tous les artisans, concepteurs, acteurs, qui ont partagé ma route depuis trente ans, et plus particulièrement encore depuis dix ans. Tous ceux et celles qui ont mis leur talent, leur énergie et leur disponibilité à servir des œuvres, des projets en toute confiance et tout abandon.

Mais ce privilège et cette liberté ont un prix, et il est très élevé, je ne le cacherai pas. Nous vivons dans un pays où l’art disparaît des préoccupations publiques et gouvernementales. Nous vivons dans un pays qui calque parfois son fonctionnement et ses préoccupations sur celui du grand voisin, et qui abandonne ses responsabilités de développement et de soutien des artistes aux lois du marché ou aux aléas du financement privé.

Dans ce pays, très peu d’individus peuvent vivre de leur art, et bien sûr, bien peu peuvent vivre de la mise en scène. Pour pouvoir ne m’adonner qu’exclusivement au théâtre, j’ai dû comme bien d’autres faire des choix, parmi lesquels celui de diriger une compagnie, de porter seule de nombreuses responsabilités, de l’écriture des communiqués de presse à la comptabilité, en passant par la recherche de fonds et d’autres activités toutes plus créatives les unes que les autres.

Devant la somme de travail à accomplir afin de pouvoir mener à bien tous les projets que j’entreprends, devant le prix à payer pour avoir le privilège d’être une metteure en scène qui choisit ses aventures, il m’arrive de me sentir découragée et épuisée. Il m’arrive aussi de me sentir étouffée.

Un prix comme le prix Siminovitch est un formidable stimulant, un formidable encouragement, à la fois symbolique et matériel. Peut-être encore plus intense quand cet encouragement arrive au mitan de la vie, au moment où l’on est à maturité et en pleine possession de ses moyens artistiques.

Souhaitons que les gouvernements provinciaux et fédéral assument leurs responsabilités avec la même ferveur que le font les généreux donateurs que vous êtes.

Il nous appartient – à nous tous – de revendiquer une juste place pour l’art, pour le théâtre, pour l’écriture, pour la dramaturgie et pour la création, afin de nous permettre, comme collectivité, de conserver l’espoir d’une société plus juste et plus humaine, plus solidaire, plus ouverte et plus intelligente.

Un des merveilleux aspects du Prix Siminovitch, c’est la possibilité de parrainer des individus ou des groupes dont on peut ainsi saluer le talent. Cette possibilité est d’autant plus importante que l’époque que nous vivons est particulièrement périlleuse pour tous les talents émergents. Aujourd’hui, l’accès aux ressources pour les jeunes créateurs est en grande partie bloqué. C’est extraordinaire de pouvoir jouer la fée-marraine !

J’ai donc le plaisir de vous présenter mes lauréats. J’en ai choisi deux, pleins de talent et d’énergie.

D’un côté, il s’agit de Francis Monty, d’Olivier Ducas et de David Lavoie, qui reçoivent le prix au nom de la compagnie qu’ils animent depuis quelques années, La Pire Espèce, consacrée au théâtre d’objets, un théâtre inventif, ludique et extraordinairement communicant. La Pire Espèce met les mots au cœur de sa démarche. C’est une compagnie talentueuse, brillante et incroyablement dynamique, très engagée dans le milieu du théâtre québécois. Elle est actuellement en tournée en France, malheureusement !

De l’autre côté, mon deuxième protégé se nomme Christian Lapointe. Créateur originaire de Québec, il a étudié la mise en scène à l’École Nationale de Théâtre, et c’est à cette occasion, puisque j’étais sa tutrice à l’école, que j’ai découvert son talent, son intelligence, sa rigueur et sa combativité. Il a fondé sa propre compagnie, pour laquelle il écrit, met en scène et joue avec succès. Il se dévoue sans compter à son art, et le fait avec beaucoup de brio. Mesdames et messieurs, j’ai le plaisir de vous présenter Christian Lapointe.

2007 Protégé

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Christian Lapointe

Christian Lapointe

Finaliste, 2016, 2019

Protégé, 2007

Image : Nom, Titre, Description

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Metteur en scène, auteur, acteur et musicien, Christian Lapointe est directeur artistique de Théâtre Péril et co-fondateur de la Canadian theatrical collective CINAPS. Il a étudié le théâtre au Conservatoire d’art dramatique de Québec et à l’École nationale de théâtre. Depuis 2000, il travaille surtout sur des pièces symbolistes et avec In-yer-face theatre. Lapointe a signé un cycle de pièces groupées sous le titre Théâtre de la Disparition. Il a monté ses propres pièces, y compris CHS (acronyme de « combustion humaine spontanée ») et Anky ou la fuite / Opéra du désordre, avec le Festival TransAmériques à Montréal, le Carrefour international de théâtre de Québec et il a fait partie de la sélection officielle pour le Festival d’Avignon.

Finaliste, 2016, 2019

Après avoir fondé le Théâtre Péril en 2000, Christian Lapointe dirige le Théâtre Carte blanche, à Québec, depuis 2013. Depuis 2001, il a mis en scène près d’une trentaine de pièces de théâtre, puisant principalement au répertoire symboliste (Yeats, Maeterlinck, Villiers de l’Isle Adam) et au répertoire contemporain (Crimp, Viripaev, Duras, Arsenault, Handke, Sauvageau), dirigeant aussi des productions de ses propres textes. L’écriture de ses spectacles, où la profération du texte tient une place prépondérante, emprunte à l’art de la performance, se conçoit à partir de dispositifs scéniques élaborés et se rapproche souvent de l’installation vidéo. Il consacre aussi une part de son temps à passer le feu aux jeunes artistes à travers des classes de maître, des cours et des mises en scène qu’il a entre autres signées à l’École supérieure de théâtre, où il est professeur, et à l’École nationale de théâtre du Canada. En 2009 il a été de la programmation officielle du Festival d’Avignon. En 2015 il a donné une performance de lecture en continue de l’oeuvre d’Antonin Artaud de près de 70 heures dans le cadre du Festival TransAmériques. En 2018 et 2019, en coproduction avec une dizaines de théâtres partout sur le territoire québécois, il a mené le projet Constituons ! en collaboration avec l’Institut du Nouveau Monde. Dans le cadre de ce projet, une assemblée constituante paritaire de citoyennes et de citoyens tirés au hasard, représentatifs de la démographie québécoise et en provenance des quatre coins du Québec, a été mise sur pied pour rédiger la première Consitution of the citizens of Québec. Celle-ci a été officiellement déposée à l’Assemblée nationale du Québec le 29 mai 2019. La pièce Constituons !, jouée et mis en scène par l’artiste, relate le périple de cette vaste aventure qui juxtapose art et citoyenneté dans une mise à l’épreuve du théâtre comme agora populaire.

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Medina Hahn

Medina Hahn

Protégée, 2008

Image : Nom, Titre, Description

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Medina Hahn est comédienne, chanteuse, auteure et co-productrice de DualMinds. Elle détient un B.F.A. en théâtre de l’Université de Victoria, et un B.F.A. en interprétation de l’université d’Alberta. Elle est montée sur la scène pour la première fois à trois ans, et elle est devenue Solid Gold Dancer. Elle est venue à l’écriture et à la creation après avoir passé des années à interpréter des pièces canadiennes, et elle tenait un journal depuis l’âge de neuf ans. Nomade dans l’âme, Medina voyage quand elle ne travaille pas avec d’autres companies.

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Daniel MacIvor

Daniel MacIvor

Lauréat, 2008

Image : Nom, Titre, Description

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2008 Lauréat

Selon le jury, « le théâtre de Daniel MacIvor – protéiforme, en perpétuelle métamorphose – se déroule sur la fine ligne entre présentation et représentation. Sa dramaturgie porte à la scène des états humains pour lesquels il n’existe pas de mot, explorant ce qui échappe aux catégorisations du langage. Préoccupé par l’exclusion, MacIvor, à travers ses pièces, donne voix à ceux dont la solitude permet d’appréhender le monde autrement. »

Daniel MacIvor est né au Cap-Breton, en Nouvelle-Écosse. Il a écrit près de 20 productions en une vingtaine d’années, dont 15 publications en son nom. Ses pièces comprennent des titres tels que See Bob Run, Wild Abandon, The Soldier Dreams, You Are Here, How It Works, His Greatness, ainsi que A Beautiful View, et, en collaboration avec Daniel Brooks, partenaire de longue date, il a créé les représentations solo House, Here Lies Henry, Monster et Cul-de-sac. Sa pièce Marion Bridge a été jouée en avant-première « Off-Broadway », à New York, en octobre 2005, alors qu’une autre de ses autres pièces, Never Swim Alone, a remporté le New York Fringe’s Overall Excellence Award de 1998. En 2002, il a remporté un prix GIAAD ainsi qu’un prix Village Voice Obie pour sa pièce In On It (PS 122). M. MacIvor est également récipiendaire de deux prix Chalmers pour une nouvelle pièce, et son collectif de cinq pièces intitulé I Still Love You a remporté le prix du Gouverneur général 2006 en écriture dramatique. M. MacIvor est également scénariste et réalisateur (House, Wilby Wonderful, Marion Bridge, Past Perfect, Whole New Thing), et de 1987 à 2007, il a été directeur artistique de la compagnie internationale de tournées théâtrales da da kamera. See Bob Run, Wild Abandon, The Soldier Dreams, You Are Here, How It Works, His Greatness, et A Beautiful View, and with long time collaborator Daniel Brooks he created the solo performances House, Here Lies Henry, Monster and Cul-de-sac. His play Marion Bridge received its Off-Broadway premiere in New York in October 2005, and his play Never Swim Alone won the 1998 New York Fringe’s Overall Excellence Award. In 2002 he won a GIAAD Award and a Village Voice Obie Award for his play In On It (PS 122). Mr. MacIvor also has two Chalmers New Play Awards to his credit, and his collection of five plays called I Still Love You won the 2006 Governor General’s Award for Drama. Mr. MacIvor is also a screenwriter and filmmaker (House, Wilby Wonderful, Marion Bridge, Past Perfect, Whole New Thing), and from 1987-2007 he was Artistic Director of the international theatre touring company da da kamera.

Discours d’acceptation

When I was asked to speak to you tonight I was asked to talk about how transformative the Siminovitch Prize has been to my life and about how important this Prize is in this country at this time, about how crucial it is to keep this Prize going, and it was suggested that I might refer to us almost having lost the Prize and what a terrible thing that would have been. And then it was mentioned that it wouldn’t hurt if I could be funny.

So in thinking about how truly transformative the Prize has been for me by allowing me to be a mentor, and thinking about how important the Prize is nationally by bringing together theatre practitioners and supporters and patrons, and in thinking about how crucial it is that theatre keep a place at the media curated table of cultural relevance and how essential the Prize has been in manifesting that – in thinking about all those things about the Prize there was a word that stood out to me. Prize.

And I got to thinking about the difference between a Prize and an Award, so between mulling, meditating and google-ing on it I’ve found a very simple difference perceived by many people who mull, meditate and google on such notions: an Award is for a thing and a Prize is for a person. Certainly this is true of this Siminovitch Prize. It is not given for a play or a production or even for an idea, it given to a person. For a person. Now in the case of an award, like a Dora Award or a Sterling Award or a Governor General’s Award – the sort of thing you might get for a play – the writing of play, the direction of a play, the design of a play – there is always the sneaking suspicion in the receiving of such an award that maybe you were just lucky. Maybe it was just the right team or the right subject or the right cultural moment. Maybe I was just lucky.

When I won the Siminovitch Prize in 2008 I didn’t feel lucky. I didn’t feel like there was that one good show with the right team in the right cultural moment. It was something different. I felt honoured. And I realized that was a feeling I hadn’t felt very much before. I am a little saddened to say that we live in a country that does not honour its artists. And in that there is always this niggling feeling that perhaps to our compatriots the work we do is not seen as being important. Now I know, in my DNA, that this work is important, as a service to the culture of this country, as a service to the human spirit, but sometimes when all the messages one is getting is to the reverse of that, it’s only human to question our place in our land. To be hounoured is to be told that what you do is important. To be reminded, to have confirmation of that fact. That your work matters. And that’s another reason why Colleen or Hannah or Michel Marc or Olivier shouldn’t feel lucky tonight, because this houour is based on work. It is earned. Luck isn’t earned. This Prize is earned. And maybe that feeling of earning has something to do with the money, perhaps it has more to do with being able to give money away. We’ve earned that honour through a life of work. And at least that’s one thing that we value in this country, hard work. And making theatre is very hard work. So tonight I will not say to the nominees, Good Luck. I will say congratulations on this amazing, important, necessary, crucial honour. Well earned. Well deserved.

2008 Protégé

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Daniel Arnold

Daniel Arnold

Protégé, 2008

Image : Nom, Titre, Description

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Daniel Arnold est un acteur canadien primé qui écrit aussi pour le théâtre et le cinéma. Récemment, il a interprété le rôle de Holloman dans Lawrence & Holloman, un film qu’il a co-signé avec le cinéaste Matthew Kowalchuk, et basé sur la pièce de Morris Panych. Daniel a également figuré dans la production Off-Broadway très prisée de Any Night, qu’il a co-signée avec Medina Hahn, et qui a été publiée par Playwrights Canada Press. Le texte a remporté le prix de la meilleure nouvelle pièce au festival Summerworks de Toronto, cinq prix dans Now Magazine, y compris meilleure performance et il a été déclaré meilleure production de l’année à Toronto et Vancouver.

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Ronnie Burkett

Ronnie Burkett

Lauréat, 2009

Image : Nom, Titre, Description

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2009 Lauréat

Ronnie Burkett est tombé amoureux de la marionnette à l’âge de sept ans… en ouvrant une encyclopédie à ce mot. Dès l’âge de 14 ans, il part en tournée avec ses spectacles de marionnettes en Alberta – et n’a jamais cessé de parcourir les routes depuis! Considéré à juste titre comme l’un des artistes de théâtre les plus éminents du Canada, Ronnie Burkett a créé certains des spectacles de marionnettes les plus complexes et les plus audacieux du monde. Son travail séduit des publics adultes d’une ampleur sans précédent pour la marionnette. Sur les grandes scènes canadiennes comme dans les festivals internationaux de théâtre, tous ses spectacles reçoivent un accueil dithyrambique, critique autant que public. Ronnie Burkett est également pédagogue : il a enseigné l’art de la marionnette dans des universités et collèges du Canada, du Royaume-Uni et de l’Australie, et donné des cours de maître, des ateliers ainsi que des conférences dans de nombreux festivals et colloques. Après 10 Days on Earth, Provenance et la trilogie Memory Dress (Tinka’s New Dress, Street of Blood et Happy), aujourd’hui retirés de l’affiche, il présente actuellement Billy Twinkle, Requiem For a Golden Boy. Quand il n’est pas en tournée, Ronnie Burkett travaille sur ses deux prochaines productions dans son studio de Toronto, entouré de plus de 1 200 livres sur la marionnette, de Plasticine et d’outils de menuiserie et d’ébénisterie…

Discours d’acceptation

Merci Dr Siminovitch. Merci aux fondateurs du Prix Siminovitch de théâtre et à BMO Groupe financier de parrainer le Prix et cette soirée, à Mary Adachi de m’avoir sélectionné et au jury pour son immense acte de foi.

Je suis ravi d’être enfin invité à l’un de ces cocktails de l’élite où, selon notre premier ministre, les artistes se pressent. Personnellement, je n’en connais pas beaucoup qui meurent d’envie de revêtir un complet. Mais je ne côtoie peut-être pas les bonnes personnes. Et je ne me considère pas non plus comme un artiste… du moins pas encore. J’espère qu’avant de rendre mon dernier souffle, ce mot s’échappera de mes lèvres, riche de sens. Pour moi, un artiste est une personne qui crée une œuvre qui ne se discute pas, mais qui se ressent. Il me semble que je suis encore loin du compte. Cependant, le Prix Siminovitch de thé âtre me laisse croire que je suis peut-être sur la bonne voie. C’est pourquoi je tiens à vous remercier tous de votre vote de confiance.

Se trouver en milieu d’une carrière, d’une vie, d’une expérience, d’un processus de compréhension, de l’exercice de son métier, est passionnant. Dans un monde avide de jeunesse et de nouveauté, je me sens invisible depuis quelques années. Trop vieux pour être la dernière attraction à la mode et trop jeune pour être un vieux maître vénéré. En fait, c’est une place de choix. Je suis assez satisfait de pouvoir simplement créer de nouvelles œuvres sans avoir à me soucier d’ecirc;tre l’enfant terrible de la presse qui passe son temps à mettre son personnage de l’avant. Si on a la chance d’arriver à mi-carrière, cela suppose que les ficelles de la technique sont maîtrisées, et que la deuxième partie du chemin sera consacrée à l’exploration d’idées et de différents contenus. C’est là ma passion, suspendu que je suis au milieu de tout cela. Je suis le plus surpris de tous d’avoir été sélectionné pour recevoir ce magnifique honneur. Mais grâce à Dieu et aux fondateurs, il y a un prix qui récompense ceux et celles qui sont tout simplement à mi-parcours. Et croyez-moi, le meilleur reste à venir; ce mitan n’est en vérité que le début.

Mon principal mentor dans le domaine des spectacles de marionnettes, Martin Stevens, a dit que l’art était notre contribution personnelle à la grande conversation sur la vie. Maintenant que je suis arrivé à mi-chemin dans ma carrière, le Prix Siminovitch me permettra de poursuivre cette discussion d’une façon significative.

Je crois que le jury a fait un choix qui ne manque pas d’audace. Un choix historique dont il n’est peut-être même pas conscient. Je suis tout à la fois concepteur, auteur, acteur, producteur, technicien ambulant, patron, collaborateur, agent de publicité, fabricant de moules et sculpteur sur bois, mais avant tout, je suis marionnettiste. Et il n’y a aucune catégorie dans les cycles de trois ans du Prix Siminovitch pour les gens de mon espèce. Et pourtant, je suis là devant vous. Je tiens à en remercier le jury, non seulement à titre personnel, mais également pour le message qu’il envoie ainsi à mon petit groupe un peu étrange dans le monde des arts, à savoir que le spectacle de marionnettes est effectivement un art à part entière qui doit être reconnu sur la scène théâtrale. La situation était bien différente quand j’ai commencé. C’est pourquoi j’espère que ce Prix encouragera les jeunes à créer des marionnettes dans le sous-sol de leurs parents et à oser rêver grand.

Je tiens à remercier personnellement les fondateurs d’avoir créé ce Prix en l’honneur des Siminovitch. Je sais ce que signifie vouloir garder en vie un esprit qui nous est cher et se rappeler une personne importante. La dernière fois que j’ai pris la parole en public, c’était il y a à peine une semaine, pour l’éloge funèbre de ma mère au service commémoratif qui a eu lieu en Alberta. J’ai appris que je venais de recevoir ce Prix le jour même où ma mère est décédée. Ma mère, et mon père qui nous a quittés l’an passé, auraient adoré cette marque de reconnaissance. J’aurais souhaité qu’ils puissent voir un groupe de banquiers organiser une fête en mon honneur. Mes parents étaient les gens les plus loyaux, les plus spectaculaires, les plus drôles et les plus simples que j’aie jamais connus. Leur soutien et leur fierté pour mes entreprises étaient infinis. Certes pas inconditionnels, mais infinis. Dans un monde qui nivelle par le bas, j’apprécie plus que jamais leurs exigences. Quand j’étais encore adolescent, mon père m’a dit : « Comment se fait-il que n’importe quel abruti dans cette pièce puisse affirmer être un artiste sans que personne remette cette affirmation en question? Si on prétend être un artiste, il faut le prouver. Et si cette affirmation est nécessaire, c’est la preuve en soi qu’elle n’est probablement pas vraie. » Voici donc en un mot résumé ce qu’était mon père… et la province de l’Alberta.

Quelles étaient les chances pour un gamin des Prairies de devenir marionnettiste et de faire une carrière internationale en théâtre? En fait, elles étaient assez bonnes. Quand j’ai commencé à me faire connaître, je veux dire quand j’étais jeune et motivé, il y avait une multitude de petites subventions dans le domaine artistique.

Ainsi, à 14 ans, j’ai obtenu 1 000 $ d’Alberta Culture pour aller au Puppeteers of America Festival, à Lansing, au Michigan. La douce folie de mes parents qui m’ont mis dans l’avion et m’ont autorisé à traverser la frontière tout seul pour frayer avec une bande de vieux fous qui faisaient danser des marionnettes est une chose. Mais mieux encore, l’Alberta a dit : Vas-y. Écoute. Apprends. Et reviens riche de nouvelles expériences. C’est ce que j’ai fait. J’ai rencontré les maîtres dans l’art du spectacle de marionnettes à ce festival et ils m’ont pris sous leur aile. Et à ma façon, je les ai ramenés avec moi.

À 18 ans, j’ai quitté l’université et avec une autre petite subvention d’Alberta Culture, j’ai participé à un congrès et à un festival internationaux de marionnettistes à Moscou. Ce que j’ai vu dans les théâtres moscovites reste inscrit dans ma mémoire et a changé à tout jamais ma vision de la vie, de la conception des marionnettes et du spectacle. À ma façon, j’ai aussi rapporté ces rencontres dans mes valises. D’une autre façon, je les ai présentées au monde, dans de multiples tournées, avec une saveur toute canadienne.

Plusieurs années plus tard, quand cette idée folle de faire du théâtre de marionnettes pour adultes m’a traversé l’esprit, le Conseil des arts du Canada avait une petite subvention intitulée Explorations qui m’a permis de me lancer dans ce projet. Le Theatre of Marionettes sillonne les routes depuis 23 ans maintenant grâce à ce premier investissement de mon pays dans une petite entreprise artistique.

Quelles étaient les chances pour un gamin des Prairies, passionné de marionnettes de faire une carrière internationale en théâtre? Elles étaient bonnes. Tout simplement parce que j’étais né au Canada et que, non seulement j’appartenais à une génération qui était alors capable de courir le monde pour y faire l’expérience de mon langage artistique et de rapporter de riches expériences dans ses bagages, mais également parce que dans le Canada où j’ai grandi et où j’ai été formé, il y avait des troupes de théâtre et de danse, et des groupes de musique qui partaient constamment en tournée aux quatre coins du pays.

J’ai vu la pièce Ten Lost Years et je me suis rendu compte pour la première fois que nous étions intéressants sur scène. J’ai vu la Canadian Opera Company présenter La Bohème. J’ai vu Danny Grossman jouer dans Higher. J’ai vu tout cela et bien plus encore à Medecine Hat, en Alberta.

Je suis d’accord avec notre premier ministre. Le milieu artistique au Canada est élitiste. Contrairement au Canada de ma jeunesse, à moins de vivre dans une grande ville et d’avoir un revenu disponible très élevé, il est impossible de voir un ballet, d’assister à un opéra, à une pièce de théâtre ou à la représentation d’un orchestre symphonique. Alors que d’autres pays savent que le meilleur moyen de mettre en valeur son caractère distinctif et son éclat sur la scène internationale consiste à exporter sa culture, notre gouvernement a purement et simplement supprimé les programmes d’exportation de la culture. Notre voix audacieuse, unique et issue du nouveau continent s’est tue sur les scènes du monde. Alors, même si les enfants d’Abbottsford, de Wawa, d’Antigosh et de Medicine Hat réussissent à attirer l’attention internationale, le Canada dit Non. C’est pourquoi, au cours d’une année de mort et de destruction, une année où j’ai très sérieusement envisagé la possibilité que ma petite troupe ambulante mette la clé sous la porte et où j’ai entendu mon pays dire Non, non et non, j’aimerais sincèrement remercier le Prix Siminovitch de théâtre, qui, lui, dit Oui haut et fort.

D’ailleurs, ce n’est pas la seule voix que j’ai entendue s’élever récemment. L’autre jour, j’étais au Starbucks de Roncesvalles quand une femme est entrée, s’est assise et a commencé à parler toute seule, à parler aux clients, aux fantômes, à Dieu, à tout le monde et à n’importe qui. Elle ressemblait, à défaut d’une description plus exacte, à une marionnette de Burkett en puissance. Édentée, très vieille et revêtue de ce mystérieux drapé de peau qui apparaît quand les lèvres, le menton et le cou ne font plus qu’un. Cheveux blancs et coupe brutale, trop nombreux sacs d’épicerie… elle demandait à différentes jeunes femmes qui se trouvaient au Starbucks si celles-ci travaillaient dans la maison où cette femme vivait. J’ai tenté de l’ignorer, mais mon désir pervers de créateur de marionnettes d’étudier son visage, ses chevilles, ses bas et le contenu de ses sacs m’a poussé à la dévisager. Et elle ne m’a plus lâché.

Elle m’a fixé et s’est mise à hurler : « Tu n’avais pas besoin de chirurgie! » J’ai de nouveau tenté de l’ignorer, concentrant toute mon attention sur mon latte vanille hypocalorique. La femme s’est remise à hurler : « Tu n’avais pas besoin de chirurgie! » C’était incroyable. Qui était-elle? Une sorcière? Une voyante? Une folle? « Tu n’avais pas besoin de chirurgie! » Qui lui avait dit? Comment pouvait-elle savoir que j’avais l’intention d’investir l’argent du Prix Siminovitch dans de si nombreuses interventions de chirurgie esthétique que, d’ici avril prochain, j’aurais la peau du visage aussi tendue que celle d’un tambour. Ah… les potins dans le monde du théâtre!

Je me suis sauvé et ai trouvé refuge sur un banc, à l’extérieur du Starbucks. Mais elle m’a suivi. Debout, là, sur les marches du café, elle m’a dévisagé et a hurlé : « Tu es le meilleur dentiste du monde! » Quelle chose étrange. Elle hurla de nouveau : « Tu es le meilleur dentiste du monde! » Vraiment très bizarre. C’était complètement fou. Et potentiellement dangereux. Enfin, si jamais le jury du Prix Siminovitch en avait vent? Que se passerait-il s’il apprenait que j’étais dentiste et non pas créateur de marionnettes? Il me déposséderait du Prix avant même que j’aie eu le temps de mettre la main dessus. « Tu es le meilleur dentiste du monde! »

Je me suis levé, prêt à partir, je l’ai regardée et lui ai dit : « Vous savez très bien que je ne suis pas dentiste ». Ce à quoi elle répliqua : « Tu es le meilleur dentiste du monde! » Je l’ai de nouveau dévisagée pendant une demi-seconde et je me suis alors rendu compte de deux choses : un, qui étais-je pour la contredire? Je puis vous assurer que je n’ai jamais tâté de la dentisterie amateur. Que je ne suis pas diplômé en chirurgie dentaire. Mais si elle voulait hurler à qui voulait l’entendre que j’étais le meilleur dentiste du monde, qu’est-ce que cela pouvait bien faire? Qui sait, peut-être y a-t-il un prix qui récompense aussi le meilleur dentiste du monde? J’aurais peut-être pu doubler mes revenus!

La deuxième chose dont je me suis rendu compte est la suivante : elle n’était ni sorcière, ni voyante, ni folle. Elle était cet être étrange et magique que je cherche dans les tramways, les aéroports et les cafés. Cette magnifique créature hurlante et imparfaite était mon inspiration, ma muse.

Pendant des années, on m’a demandé : « Bon sang, Ron, comment tu trouves tes personnages? » Eh bien. J’ai un chaudron où bouillonnent toutes sortes de niaiseries et d’inventions dans mon studio, mais la source de mes personnages, c’est nous. Nombreux sont les marionnettistes à façonner des personnages fantastiques, des gargouilles et des monstres, des anges et des démons, des elfes et des animaux qui parlent. Je crée de petits personnages, des représentations plus petites de nous tous; parce que dans mon espèce, il y a assez d’anges et de démons.

Alors cette femme tout à la fois magnifique, folle et abîmée par la vie qui ne cessait de proclamer que j’étais le meilleur dentiste du monde allait sans aucun doute se frayer un chemin sur scène, dans mon prochain spectacle, une icône en bois ratatinée dont la folie et le désespoir évoquaient la condition humaine. Une vision iconique de nous-mêmes sur scène qui peut-être ne se prête à aucune discussion, mais se laisse simplement ressentir.

Je suis le produit de mes mentors et de leur confiance en moi. De prestigieuses, magnifiques et imparfaites brutes de l’art du spectacle de marionnettes qui m’ont appris à dessiner, à sculpter et à observer, mais surtout, m’ont poussé à dépasser les limites du simple divertissement facile et charmant que cet art était devenu. Je suis aussi le produit de mon pays et de la confiance qu’il m’a faite. Certes, le Canada anglophone n’est peut-être pas le lieu de prédilection de la création théâtrale de l’heure, mais je continue de croire que je suis ici devant vous ce soir simplement parce que j’étais un enfant canadien passionné de marionnettes. Nous avons peut-être tous la responsabilité de faire de notre environnement un monde meilleur. En tant que marionnettiste, fils et Canadien, j’espère pouvoir y parvenir en échange des immenses faveurs qui m’ont été accordées.

J’ai une énorme dette envers les collègues et les artisans qui ont travaillé avec moi au cours des années pour créer mes marionnettes. Leur amitié, leur passion et leur souci du détail n’ont cessé de faire de moi une personne meilleure et m’ont poussé à continuer alors que je me retrouvais parfois assis sur une montagne de sciure, à me demander comment j’allais bien pouvoir honorer une autre échéance impossible. Je suis aussi reconnaissant et redevable envers un nombre incalculable de concepteurs, d’auteurs, d’acteurs, de danseurs, de techniciens et de musiciens qui m’ont inspiré, m’ont remis en question et plus encore m’ont fait la grâce de leur générosité d’esprit. Personne n’a bénéficié d’une plus grande bonté.

Pour Martin Stevens, mon mentor, qui, mon père mis à part, a été l’homme le plus influent dans ma vie et certainement l’un des plus dignes d’être cité, une marionnette était une idée mise en forme et en mouvement. Il insistait pour que les trois éléments indispensables soient présents : la forme physique, la pensée ou l’impulsion à l’origine de la création du personnage et le mouvement sur scène. Je me suis rendu compte l’autre jour qu’il s’agissait là d’une excellente description; elle s’applique aussi à la vie d’une personne. C’est pourquoi je suis reconnaissant d’avoir obtenu le Prix Siminovitch de théâtre qui ne manquera pas de me pousser à réfléchir et à aller de l’avant, encore et toujours. Je pars en tournée avec mes spectacles depuis l’âge de 14 ans. Ma carrière est plus longue que celle du premier ministre. Alors, grâce à ce fol acte de foi et de confiance répétée dans le gamin passionné de marionnettes que le Prix Siminovitch récompense aujourd’hui, cette voix audacieuse, unique, issue du Nouveau Monde et éminemment canadienne continuera de se faire entendre.

Merci.

En retour, j’ai le plaisir de pouvoir faire bénéficier une jeune artiste canadienne, elle aussi conceptrice de marionnettes et marionnettiste, de mon vote de confiance et d’une partie de ce Prix extraordinaire. Il s’agit d’une jeune femme qui est à n’en pas douter une puriste. Elle a assisté à un spectacle de marionnettes d’un compatriote – ce compatriote – il y a quelques années et s’est dit… eh… c’est ce que je veux faire. Elle est partie étudier à l’Institut international de la marionnette, en France, en est ressortie diplômée et a, elle aussi, rapporté toute cette richesse dans ses bagages. Une jeune femme qui, lorsque je lui ai téléphoné pour lui annoncer qu’elle avait gagné une partie de ce Prix, s’est mise à pleurer et s’est écriée : « Je vais pouvoir monter un nouveau spectacle! ». Je n’aurais pu mieux choisir. Il s’agit de Clea Minaker. J’ai l’immense plaisir de vous la présenter à titre de protégée du Prix Siminovitch de théâtre de cette année.

2009 Protégée

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Actualités Simi

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Cléa Minaker

Cléa Minaker

Protégée, 2009

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Clea Minaker est interprète, scénographe et metteure en scène et elle amène un langage moderne de marionnette au théâtre, au cinéma, aux vidéos de musique et à des spectacles musicaux. De 2002 à 2005 Clea a reçu son entraînement avec la sixième promotion de L’École nationale supérieure des arts de la marionnette, à l’institut international des arts de la marionnette à Charleville-Mezières, France. En 2007-2008, elle a fait une tournée internationale avec Feist, spectacle pour lequel elle a conçu la scénographie et qu’elle a interprété pour près de cent représentations. Ses créations pour le théâtre incluent: The Living Lantern (Festival Casteliers ‘carte blanche’ 2009), Beauty (commandité par Youtheatre 2010), Oh! What a Feeling (Festival Casteliers 2007), et Immobile (Rhubarb! Festival of New Works, 2006). Clea a enseigné la marionnette en tant qu’artiste invitée à l’université McGill, à Concordia, à The Deer Crossing Art Farm (Gibsons B.C), et à M.a.i à Montréal. Clea Minaker a grandi sur l’île de Vancouver et elle vit à Montréal.

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Kim Collier

Kim Collier

Lauréate, 2010

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2010 Lauréate

Avant de commencer sa carrière de metteure en scène, Kim a étudié le théâtre à l’Université de Victoria, le théâtre physique à Mime Unlimited, à Toronto, et obtenu, en 1994, un diplôme d’interprétation sanctionnant trois années d’études au Studio 58 de Vancouver. Un an plus tard, elle participe à la fondation de l’Electric Company Theatre dont le travail est rapidement reconnu à l’échelle nationale comme moteur de la renaissance du théâtre indépendant à Vancouver. Sous sa direction, la compagnie a créé une dizaine d’œuvres originales, issues d’un intense processus de collaboration, dont trois productions majeures « spécifiques au site ». Kim est de plus en plus présente sur les grandes scènes canadiennes et dans les festivals du pays, notamment au Theatre Calgary, au Festival TransAmérique, au Centre national des Arts, au Citadel Theatre et à la Canadian Stage Company. En 2011, son interprétation cinématique en direct de No Exit sera présentée par l’American Conservatory Theatre, à San Francisco. Kim a reçu de nombreux prix, notamment trois prix Jessie Richardson pour la mise en scène, un prix Betty Mitchell récompensant la meilleure production et, en 2009, le prix du Maire de Vancouver pour les arts.

Discours d’acceptation

Quel formidable honneur, que celui de recevoir le Prix Siminovitch (sim-in-ove-itch) de la mise en scène. J’aimerais exprimer mes remerciements les plus sincères aux fondateurs de ce prix, à la fois pour avoir offert cette chance merveilleuse, à moi et aux autres lauréats, mais aussi pour tout ce que cela signifie pour le théâtre canadien. Merci à BMO Groupe Financier de soutenir ce prix et d’organiser cette soirée. Je souhaite également exprimer ma gratitude à Maureen Labonté, présidente du jury, et aux membres du jury Marcus Youssef, Marti Maraden, Marie Clements, Alain Jean, et Jillian Keiley. Merci aussi à Matthew Jocelyn, qui a si bien pris soin de ma nomination.

Il est merveilleux que ce prix rende hommage à la remarquable histoire de Lou Siminovitch et de sa femme, la regrettée Elinore, et aux liens qu’ils faisaient naître entre l’art et la science. C’est dans cet esprit que j’aimerais évoquer l’anecdote suivante : il y a quelques années, à la demande du Dr Michael Hayden, du Centre de médecine moléculaire et de thérapeutique, mes collaborateurs de l’Electric Company et moi-même avions monté une pièce intitulée The Score, une pièce qui deviendra par la suite un long métrage diffusé sur CBC. On attendait de notre projet qu’il suscite une discussion à propos de l’aspect éthique de la génétique, un domaine sans cesse en évolution. Nous nous sommes plongés dans nos recherches, profitant de l’accès que nous avions au laboratoire et à l’équipe de chercheurs de Michael. Ce qui nous a le plus surpris alors, c’était de nous reconnaître en tant qu’artistes dans cette communauté scientifique : c’est la même passion qui nous pousse à aller vers l’inconnu, à explorer des idées et à formuler des questions, à nous lancer dans des projets novateurs pour améliorer la condition humaine et à montrer une insatiable curiosité pour notre travail. Nous nous sommes fait des amis extraordinaires et je crois que nous avons contribué à la création d’un véritable dialogue au sein d’une communauté élargie. Je remercie donc tout particulièrement Lou et Elinore, les inspirateurs de ces récompenses qui savaient, chacun, lire dans le cœur de l’autre et comprenaient les idéaux partagés de l’art et de la science, qui ont plus de points communs que de différences.

Lorsque j’ai reçu l’appel de Maureen m’annonçant que j’allais être la lauréate de ce merveilleux prix, j’ai été abasourdie et submergée par l’émotion. Et puis après avoir raccroché le téléphone, ma première pensée a été celle-ci : « Comment suis-je arrivée là ? Qu’est-ce qui a déclenché cette passion dévorante que j’ai pour le théâtre ? »

Immédiatement, je me suis mise à penser à la façon dont mes parents m’ont élevée, m’encourageant à croire en mes rêves et en la vie.

J’ai grandi entourée d’une multitude d’actes de création essentiels et pratiques : la poésie prolifique de grand-mère, son tissage, sa broderie, ses toiles et ses pâtisseries. Papa travaillant dans son atelier, le soir, pour faire des bijoux ou des meubles, sculpter des planches à découper personnalisées pour chacune des femmes de la famille. Son jardin. Mes cousins, mes frères et moi faisant des cartes, des maisons hantées, des émissions de radio, des films super 8 et des forts. Le jardin de grand-père. Grand-mère en train de jouer du piano, moi en train de jouer du piano. Grand-père qui se mettait à chanter en rencontrant quelqu’un, et pour qui il réussissait toujours à trouver une chanson comportant son prénom. Sans oublier les chansons transmises de génération en génération, entonnées par mes oncles et tantes et reprises en cœur autour d’un feu de camp. Dans cette incroyable application à vivre, à être ensemble, j’ai eu l’avantage de savoir très tôt ce qui était vraiment essentiel dans la vie.

Je viens d’une famille puissante. Puissante, dans le sens où elle est chargée d’amour ; pour le meilleur et pour le pire, nous nous exprimons à cœur ouvert, nous choisissons de nous soutenir mutuellement et nous ne nous cachons rien.

Quand j’étais enfant, ma mère me disait toujours : « Tu peux faire tout ce que tu veux, dans ce monde. » Mon père, lui, disait : « Ne te dépêche pas d’atteindre ta destination dans la vie parce qu’une fois que tu y seras, tu y seras pour longtemps, alors amuse-toi en chemin. » C’est à l’université de Victoria que j’ai suivi mes premiers cours de théâtre. J’ai quitté le programme avant la fin et suis partie faire du vaudeville dans le Yukon, au Palace Grand Theatre. Mon père m’a alors suggéré d’utiliser une partie de la somme que ma mère et lui avaient mise de côté pour mes études afin de m’acheter une fourgonnette Volkswagen. Quand j’ai voulu la transformer en véhicule de camping pour y vivre, il m’a aidée à enlever les sièges et à construire un lit, des placards et des tiroirs. Un mois plus tard, environ, je l’appelais de Dawson City pour lui dire que j’avais très envie de peindre des motifs sur la carrosserie, mais que je craignais que cela fasse baisser la valeur de revente du véhicule. Peu après, je recevais une boîte de couleurs expédiée par mes parents. Ils me donnaient le sentiment que tout était possible, une permission de reconnaître que le bon choix n’est pas toujours le plus pragmatique. Et avec tout cela, ils me faisaient le cadeau de la liberté.

J’appartiens à une communauté magnifique, compliquée, politisée et passionnée, c’est ma famille, et grâce à elle, à cette tribu, j’ai toujours eu le sentiment de faire partie de quelque chose, de savoir clairement qui j’étais. Enfant, j’étais consciente du fait que cela me distinguait des autres enfants. J’étais une marginale, une marginale parfaitement intégrée à sa tribu. Mais c’est cette différence qui me poussait à créer une communauté.

Et je pense qu’en fin de compte, si l’on y regarde bien, au-delà de l’amour de l’art, au-delà de mon ambition, au-delà de la sueur, des larmes, de l’angoisse et de l’enthousiasme, du stress et du doute, ce que j’ai toujours cherché à faire, avec mon œuvre théâtrale, c’est créer une communauté. Créer des moments dans le temps qui seront incontestablement présents et partagés. Impliquer directement les membres du public. Déclencher leur lien, intellectuel ou émotif, avec le contenu, leur lien avec eux-mêmes et avec les autres. Provoquer, susciter une discussion après la représentation ou même insister pour qu’il y en ait une. Donner au public une fabuleuse occasion de se sentir vivant. Vivant parce qu’il vient de participer à une expérience qu’il n’avait encore jamais connue et à laquelle il ne s’attendait pas.

Je crois que les gens ont besoin de sentir ce niveau de qualité que l’on ressent lorsqu’on est inclus dans un processus, lorsqu’on fait partie d’une entité plus grande que soi, là où le lien physique, émotif ou spirituel qui nous rattache aux autres est authentique.

Pour moi, la scène est cet espace rare où nous partageons des questions sur notre identité et nos croyances, où nous trouvons une expérience collective dans un monde sans cesse plus médiatisé, un monde qui nous sépare et nous pousse vers l’isolement.

J’ai participé, au cours des quinze dernières années, à une remarquable renaissance dans le milieu du théâtre de création à Vancouver. C’est là que de nombreuses compagnies de théâtre de création ont fait le choix conscient et public de ne pas se traiter en concurrentes, mais plutôt en collaboratrices et collègues dans un esprit de ressource partagée et, plus important encore, d’amitié. Je crois que c’est ce choix, plus que tout autre, qui a permis à notre art de progresser jusqu’à devenir le milieu dynamique que l’on connaît maintenant, de créer de nouvelles institutions culturelles et d’aider des artistes indépendants travaillant à Vancouver à monter des spectacles qui seront ensuite présentés ailleurs au Canada et à l’étranger. J’accepte cette récompense en hommage à tous les merveilleux artistes de théâtre avec qui j’ai travaillé à Vancouver, alors que nous poursuivions ensemble un rêve : la création et la diffusion d’un théâtre propre à notre ville, à notre pays et à notre époque.

Le fait qu’ensemble nous sommes plus forts m’est toujours apparu comme une évidence et a été pour moi une grande source de motivation. Mon expérience m’a enseigné que nous pouvons provoquer de profonds changements au sein de cette communauté, simplement en ayant une vision, en invitant les autres à partager cette vision et en laissant chacun se l’approprier.

Mais nous faisons face à certains défis, à Vancouver. C’est une ville jeune et une province où la fonction essentielle de l’art et de la culture n’est pas encore assez largement appréciée ou comprise. Les réductions budgétaires massives et décomplexées effectuées l’année dernière dans le secteur culturel provincial en sont une preuve flagrante. Nous avons besoin que nos collègues provinciaux de la culture, du gouvernement et des affaires aident les décideurs de la Colombie-Britannique à comprendre ce que bon nombre de nos concitoyens savent déjà : l’art n’est pas une fioriture. Il est essentiel au développement d’une population cultivée, engagée et active ; une population qui, dans le contexte d’une société définie par des intérêts financiers, nous aide à définir activement les valeurs du monde dans lequel nous souhaitons vivre.

Il est crucial que des prix nationaux d’importance comme le Prix Siminovitch reconnaissent l’excellent travail accompli dans cet immense pays et qu’ils contribuent à communiquer la valeur de l’art. Le fait que ce prix attire l’attention sur notre communauté de Vancouver en cette année de coupures budgétaires est particulièrement précieux.

J’aimerais maintenant évoquer certaines des relations professionnelles les plus significatives qui ont joué un rôle crucial dans ma carrière.

ODE à Jan. La poésie et la magie des « appels ».

Le régisseur de plateau, c’est le chef d’orchestre au centre d’une composition de théâtre intégré, installé à la barre d’une pièce, dirigeant les éléments de machinerie de la scène pour en faire des histoires vivantes, des illusions et des rêves. Un régisseur de plateau respire avec le public, sentant avec les acteurs la forme que prend une pièce, lui donnant vie soir après soir. J’adore le fait qu’en 2010, alors qu’autour de nous, tant de choses sont devenues automatisées, au théâtre, peu importe le niveau de sophistication, il y a toujours une personne en chair et en os pour « faire les appels ». « Appel », quel mot merveilleusement suranné… Un simple code chuchoté fait de « tenez-vous prêts » et de « allez-y » qui forment une chaîne humaine d’imperceptibles actions physiques : hisser des cordes, tirer des rideaux, changer de costume ; les objets passent de mains en mains, les corps se glissent dans l’obscurité et le silence, le tout dans la peur d’être aperçu, de faire une erreur et de tout interrompre. Que fait-on alors ? Le régisseur de plateau doit intervenir, penser vite et sauver la journée.

J’ai eu la chance immense de travailler pendant la plus grande partie de ma carrière avec une régisseuse de plateau remarquable. J’aimerais, ce soir, rendre hommage à sa capacité phénoménale et surhumaine à faire les appels pour un spectacle et à gérer un processus créatif. Il s’agit de la merveilleuse et talentueuse Jan Hodgson. Je ne compte plus le nombre de fois où je me suis agenouillée à ses pieds en reconnaissance de son génie. Elle possède l’intuition d’une artiste et sans cela, les projets que nous avons montés ensemble auraient été privés de sa grâce, de son sens de la synchronisation et de son style. Jan, je t’aime – on se voit demain à la technique.

Pendant plus de 15 ans, j’ai créé des spectacles avec Kevin Kerr et Jonathon Young, mes collaborateurs de longue date. En 1996, nous avons fondé, avec David Hudgins, une compagnie de théâtre appelée The Electric Company. Et pendant des années et des années, nous avons fait de la création théâtrale ensemble. Difficile d’exprimer ce que nous avons représenté les uns pour les autres et ce que nous avons accompli ensemble. Ce prix, bien sûr, est à partager avec Kevin et Jonathon pour leurs idées, leur créativité et leur intelligence, qui imprègnent mon travail. Nous avons été véritablement courageux les uns avec les autres et déterminés à faire le meilleur travail possible. Nous avons repoussé nos propres limites et, parfois, les limites de notre art. Je me demande s’il est même possible pour nous de ne pas travailler ensemble, tant nous partageons une synergie artistique rare. Je veux juste dire à quel point j’ai été inspirée et mise au défi par vous deux. Vous avez tous deux été mes plus grands alliés au théâtre, ma plus grande éducation au théâtre et mes plus grands amis. Merci à vous, Kevin et Jonathon, pour votre intégrité, votre humanité et votre inlassable complexité. Il est tout à fait remarquable que nous ayons résisté, au fil du temps, à l’intensité du processus créatif et que nous soyons en mesure de nous qualifier de plus grands amis.

Ma fille Azra North Young aurait été très fière de sa maman, aujourd’hui. Elle a soutenu mon travail de façon merveilleuse et a passé d’immenses chapitres de sa vie à mes côtés, en salle de répétition, dans les fauteuils d’un théâtre, lors de lectures, de réunions du conseil, en tournée… et elle aimait tous nos spectacles. Nous l’avons toujours considérée comme le cinquième membre de l’Electric Company. Elle était encore bébé lorsque nous avons commencé et je suis devenue metteure en scène en même temps que maman. En réalité, ce tiraillement émotionnel que je vivais, entre ma passion du travail et mon désir d’être une bonne mère, n’a jamais été résolu. De bien des façons, j’avais l’impression d’être une pionnière en créant des moyens de faire cohabiter ces deux immenses engagements. Je crois que l’un des grands cadeaux que Jon et moi avons faits à notre troupe de théâtre, c’est de prouver qu’il est possible de placer à la fois la famille et le théâtre au centre de notre vie. À toutes les metteures en scène et les créatrices qui ont des enfants : bravo, soyez courageuses et brisez le moule – faites entrer vos enfants dans la salle, allaitez-les entre deux scènes, emmenez-les en tournée, chuchotez en parlant de procédés, d’acteurs, de ce qui a fonctionné ou pas. Laissez vos enfants prendre leur place dans votre vie, laissez-les se nourrir de votre passion.

Nous avons perdu Azra et ses cousins dans des circonstances tragiques il y a un peu plus d’un an. Ce n’est pas le moment de parler de ces choses-là et en même temps, si… parce que lorsqu’on vit une perte aussi douloureuse et impossible, on redécouvre à quel point, dans de tels moments, l’art résonne avec un écho d’autant plus puissant. Seuls les mots tissés en poésie peuvent reconnaître et dire votre peine. Seule la musique peut exprimer l’esprit du divin. Seule la danse peut dire l’essence spirituelle de ma fille. Seule la communauté se rassemblant pour élaborer rituellement un mandala pouvait m’apporter une quelconque forme d’espoir et de foi. Le théâtre est un rituel, le théâtre est une poésie, le théâtre est une communauté. Le théâtre a été ma raison de continuer avec le maigre espoir de faire en sorte que d’autres estiment que la vie vaut la peine d’être vécue – de donner du sens, de l’espoir ou une forme de libération.

Le théâtre, c’est cet infini lieu de découverte dans lequel nous pouvons toujours trouver du nouveau, de l’étrange, du remarquable, de la profondeur, de la sagesse. C’est la muse de mon éternelle quête.

Il y a quelque chose de divin dans le fait que je reçoive ce prix à cette étape de ma vie. Je crois que l’année, le mois et le jour ne pourraient être mieux choisis. Et je m’engage à honorer ce prix, à ne pas oublier ce cadeau et à ne pas oublier non plus à quel point, grâce à cette occasion, la possibilité m’est offerte de renforcer mon cœur, ma vision, mes connaissances et ma compréhension des choses. Je fais le vœu d’insuffler cette inspiration à mon travail dans l’espoir qu’il atteigne et inspire une plus large communauté.

L’un des merveilleux aspects de ce prix est l’occasion qu’il me donne de remettre à un ou une artiste du monde du théâtre une récompense de vingt-cinq mille dollars. Voilà pour moi l’occasion rêvée de rendre hommage à une femme que je respecte infiniment en tant que metteure en scène et qui lance maintenant ses propres créations théâtrales. Il y a quelques années de cela, elle a collaboré avec moi à deux projets et j’ai tout de suite su qu’elle était une véritable metteure en scène : ses remarques étaient perspicaces, son intuition intense et sa créativité bouillonnante. L’année dernière, j’ai découvert Kismit, sa plus récente création collective, dont j’ai adoré la sensibilité et la mise en scène novatrice. Elle est fraîchement diplômée en mise en scène de l’École Nationale de Théâtre du Canada. Cela me donne l’immense plaisir de soutenir une autre metteure en scène impliquée dans le théâtre de création, une femme qui apporte sa propre vision à la scène : permettez-moi de vous présenter Anita Rochon.

2010 Protégée

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Anita Rochon

Anita Rochon

Protégée, 2010

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Anita Rochon est metteure en scène, auteure et comédienne et travaille à Vancouver et un peu partout au pays. Elle a contribué au développement de plus de 25 nouvelles œuvres pour le théâtre, allant du simple mouvement à des scénarios et des textes de théâtre traditionnel. Elle a fait la mise en scène de KISMET one to one hundred, elle a co-écrit Townsville, avec des étudiants de deuxième année du Studio 58, elle a joué dans 2 Truths + 1 Lie = Proof (HIVE) et assuré la mise en scène de deux des spectacles de la Patti Fedy trilogy. Elle a fait partie de la distribution de BIOBOXES de Theatre Replacement qui a fait une tournée de OYR’s High Performance Rodeo, PuSh Festival, BC Scene, The Theatre Centre et le FTA. Elle a fait des mises en scène pour l’Opéra de Vancouver, le Théâtre la Seizième, Theatre Replacement et au Studio 58 où elle a reçu sa formation. Elle est diplômée du programme de mise en scène de l’École nationale de théâtre.

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